Politique monétaire
Le gouvernement dispose de deux principaux moyens pour influencer l’économie : la politique budgétaire et la politique monétaire. La politique budgétaire est l’approche la plus directe, où le gouvernement prélève des impôts et des subventions pour tenter d’équilibrer son budget tout en stimulant la croissance. La politique monétaire, quant à elle, est moins directe : elle ajuste les taux d’intérêt et modifie la masse monétaire.
Qu’est-ce que la masse monétaire ?
La masse monétaire est la quantité totale de monnaie en circulation à un instant T. Ce chiffre varie considérablement selon le type de monnaie considéré. Les économistes classent généralement la masse monétaire en quatre catégories, selon leur liquidité. Plus la monnaie est liquide (c’est-à-dire facile à dépenser), plus sa catégorie de masse monétaire est restrictive.
M0 – Espèces

L’image la plus restrictive de la masse monétaire est celle des espèces et des pièces physiques. Autrement dit, il s’agit de la quantité de monnaie en circulation dans l’économie. M0 ne prend pas en compte la « monnaie électronique » (comme l’argent déposé sur un compte courant). M0 n’est plus très souvent utilisé, car il est très facile de dépenser de l’argent directement depuis un compte bancaire.
M1 – Espèces + Comptes courants
Le niveau supérieur est M1, ou « argent liquide ». Il s’agit de tout l’argent facilement dépensable immédiatement, ce qui inclut à la fois les espèces et les comptes courants. M1 est bien plus important que M0, car la plupart des gens détiennent généralement beaucoup plus d’argent sur leurs comptes courants que sous forme d’espèces.
M2 : Espèces + Comptes chèques + Épargne
M2 est encore plus vaste : il comprend tout ce qui est compris dans M1, plus les dépôts sur les comptes d’épargne et certains certificats de dépôt. Il s’agit d’une catégorie à part, car un niveau supplémentaire est requis avant de pouvoir dépenser cet argent. En général, il faut transférer de l’argent de son compte d’épargne vers son compte courant avant de pouvoir le dépenser, ce qui le rend légèrement moins liquide. M2 est parfois appelé « quasi-monnaie » en raison de la nécessité d’effectuer un transfert avant de pouvoir le dépenser. Il s’agit de la mesure la plus couramment utilisée de la masse monétaire comme indicateur de la croissance économique.
M2 est très souvent utilisé comme substitut de « masse monétaire ». Comme il inclut la plupart des types de dépôts, il inclut les « multiplicateurs monétaires » du système bancaire à réserves fractionnaires (voir notre article « Comment la monnaie est créée » pour plus de détails).
M3 : Espèces + Comptes chèques + Épargne + Marchés monétaires
M3 est encore plus vaste que M2 : il comprend également des comptes d’épargne à taux élevé avec restrictions sur les retraits. Ces comptes sont appelés « comptes du marché monétaire » (ou certains certificats de dépôt plus importants sont également éligibles). Avec ces comptes, le déposant bénéficie d’un taux d’intérêt plus élevé qu’un compte d’épargne classique, mais il doit maintenir un solde minimum très élevé et limiter le nombre de retraits possibles.
En raison de ces restrictions, les comptes du marché monétaire sont « moins liquides » que les comptes d’épargne classiques.

Politique monétaire – Vue d’ensemble
La politique monétaire est définie par la Réserve fédérale, et non par le Congrès et le Président. Ceci est important, car cela signifie que la politique monétaire est généralement plus éloignée de la « politique » habituelle de Washington. La Réserve fédérale poursuit deux objectifs principaux en matière de politique monétaire : stimuler la croissance économique et maîtriser l’inflation.
Inflation et croissance

L’inflation et la croissance sont étroitement liées. L’économie croît lorsque davantage de personnes investissent leur épargne pour soutenir la croissance des entreprises et dépensent davantage en consommation. Cela signifie que la croissance est généralement financée par l’emprunt : la plupart des entreprises contractent des prêts pour alimenter leur propre croissance.
Le recours à un emprunt entraîne une croissance de la masse monétaire, tandis que son remboursement entraîne sa contraction. Cela signifie que sur toute la durée du prêt (de l’emprunt initial à son remboursement intégral), la masse monétaire ne varie pas. Cependant, les entreprises dépensent le prêt avant de le rembourser, mettant ainsi cet argent en circulation.
Si l’économie est en croissance, cela signifie que davantage de personnes contractent des prêts aujourd’hui qu’hier. Cela signifie que la masse monétaire croît avant le reste de l’économie, ce qui provoque une certaine inflation.
L’inflation causée par la croissance – exemple
- Étape 1 : L’entreprise contracte un emprunt (augmentant ainsi la masse monétaire).
- Étape 2 : L’entreprise utilise l’emprunt pour embaucher un nouvel employé et lui verser son premier salaire (mettant ainsi l’argent en circulation).
- Étape 3 : L’entreprise fournit un service à l’un de ses clients et est rémunérée pour ce service (générant un bénéfice).
- Étape 4 : L’entreprise rembourse son emprunt.
Dans cet exemple, l’entreprise paie son employé, et celui-ci dépense son salaire avant que l’entreprise ne soit payée par son client et ne rembourse son prêt. Cela signifie que, même si les entreprises contractent des emprunts pour stimuler la croissance, cet argent entre dans l’économie avant que la nouvelle valeur ajoutée (c’est-à-dire la croissance générée par l’entreprise) ne soit créée. Entre le moment où l’employé est payé et celui où l’entreprise fournit son service au client, de l’argent a été injecté dans l’économie, mais aucune croissance n’a été générée. Plus d’argent, mais pas de croissance, signifie une légère inflation.
Ce même cycle se répète des millions de fois chaque semaine : particuliers et entreprises contractent et remboursent des emprunts. Puisqu’il y aura toujours un décalage, la masse monétaire doit croître avant le reste de l’économie : c’est la source de « l’inflation par la croissance ».
Inflation galopante

L’inflation galopante se produit lorsque cet équilibre est rompu. Si trop d’argent entre dans la masse monétaire avant d’être remboursé, les entreprises commencent à intégrer une inflation « attendue » de plus en plus forte dans leurs plans d’affaires. Cela signifie qu’elles augmentent leurs prix de plus en plus pour pouvoir faire face à la hausse attendue des coûts, forçant toutes les autres entreprises à faire de même.
Cela signifie que les prix continuent d’augmenter sans créer de valeur ajoutée pour l’économie. Concrètement, l’épargne des particuliers perd de sa valeur et les salaires valent moins.
La Réserve fédérale utilise la politique monétaire pour maintenir l’équilibre entre inflation et croissance : elle encourage les entreprises à emprunter et à croître, tout en prévenant l’inflation galopante.
Outils de politique monétaire
La Réserve fédérale dispose de trois outils pour déterminer la masse monétaire : les taux d’intérêt, les réserves obligatoires et les achats d’obligations.
Manipulation des taux d’intérêt
C’est l’outil le plus puissant. La Réserve fédérale fixe directement le taux des fonds fédéraux, c’est-à-dire les taux d’intérêt auxquels les banques se prêtent mutuellement de l’argent. Il s’agit du taux d’intérêt de référence « sans risque » pour les banques. Ainsi, si le taux des fonds fédéraux augmente, tous les autres taux d’intérêt augmentent, ce qui décourage l’emprunt. Si le taux des fonds fédéraux baisse, tous les autres taux d’intérêt baissent, ce qui encourage l’emprunt.
Chaque mois, la Réserve fédérale surveille l’ensemble des données économiques des États-Unis et se réunit pour discuter des niveaux d’inflation et de croissance. Si l’inflation semble trop élevée, elle augmente le taux des fonds fédéraux. Cela diminue le nombre total de nouveaux prêts contractés par les particuliers et les entreprises, ce qui fait baisser le taux d’inflation.
Si l’économie semble avoir du mal à croître, elle fait l’inverse : elle baisse le taux des fonds fédéraux pour encourager l’emprunt et la croissance. La Réserve fédérale modifie fréquemment les taux d’intérêt en fonction de l’économie. Chaque mois, elle annonce la politique du mois suivant (hausse, baisse ou maintien des taux).
Exigences de réserve

Il y a des limites à ce que l’on peut faire en modifiant simplement les taux d’intérêt. Par exemple, en cas d’inflation élevée mais de faible croissance économique, augmenter ou baisser les taux d’intérêt semble être une mauvaise option.
Un autre outil possible consiste à modifier les réserves obligatoires des banques. À la fin de chaque journée, les banques doivent conserver un certain pourcentage de leurs dépôts « en réserve », c’est-à-dire ne pas les prêter. C’est ce qu’on appelle les « réserves obligatoires », qui fixent une limite stricte au montant que les banques peuvent prêter à tout moment.
Si l’inflation est élevée mais la croissance faible, la Réserve fédérale peut abaisser les réserves obligatoires. Cela permettra aux banques d’accorder davantage de prêts pour alimenter la croissance, tout en maintenant des taux d’intérêt élevés pour lutter contre l’inflation. Il s’agit d’un outil à sens unique : si la Réserve fédérale abaisse les réserves obligatoires, elle devra les relever lorsque l’économie repartira à la croissance (sous peine de ne pas pouvoir utiliser cet outil lors de la prochaine crise). Les réserves obligatoires ne changent pas très souvent – généralement moins d’une fois par décennie.
Achat d’obligations
L’achat d’obligations, ou assouplissement quantitatif, est la forme la plus extrême de politique monétaire. Il s’agit d’un nouvel outil développé en réponse à la crise économique de 2007, alors que l’inflation et la croissance étaient faibles, mais que les taux d’intérêt ne pouvaient être abaissés.
Lorsque les investisseurs et les entreprises estiment que l’économie se contracte, ils ont tendance à retirer leur argent des marchés et à le placer dans des actifs « sans risque » comme les obligations, où ils offrent un rendement garanti. L’achat massif d’obligations réduit la masse monétaire, car il retire l’argent des banques et de la circulation. Moins de monnaie disponible signifie moins de prêts et moins de croissance globale ; la masse monétaire doit croître pour que l’économie se développe.
Pour ce faire, la Réserve fédérale achète d’énormes quantités d’obligations au Trésor, puis les revend immédiatement sur le marché libre. Cela inonde le marché obligataire, faisant baisser les prix (et les rendements) des obligations. Les entreprises et les investisseurs considèrent alors les obligations comme un investissement « moins rentable », ce qui les incite à réinvestir leur argent dans d’autres entreprises et investissements, augmentant ainsi la masse monétaire et ouvrant la porte à la croissance.